28/10/2025 – BROMO: Interrogations ?

Espace : Qui contrôlera la future joint-venture Airbus-Thales-Leonardo ?

L’ex-Finmeccanica détiendrait 32,5 pour cent du nouvel ensemble, soit moins de la moitié du français Thales qui, à terme, devrait en contrôler 67,5 pour cent.

https://www.agenzianova.com/news/spazio-chi-controllera-la-futura-societa-mista-airbus-thales-leonardo/

Rome

27 octobre 2025

© Agenzia Nova

L’Italie n’a pas l’intention de laisser son industrie spatiale « sous l’influence de qui que ce soit », a déclaré le ministre des Affaires étrangères. Antonio Tajani, Interrogé sur le protocole d’accord signé vendredi dernier par Airbus, Thales et Leonardo, le directeur de la Farnesina a déclaré : « Nous ne devons pas abandonner notre rôle, car nous possédons un niveau d’expertise exceptionnel et une industrie de pointe, capable de rivaliser avec n’importe qui. » Il a toutefois ajouté que « les collaborations à l’échelle européenne ont toujours existé. » Ce commentaire semble suggérer que l’annonce du 24 octobre s’inscrit dans ce type de collaboration.

En réalité, selon le protocole d’accord, Airbus, Thales et Leonardo transféreraient leurs activités spatiales respectives – hors lanceurs – au « Projet Bromo », qui deviendrait alors une entité distincte, basée à Toulouse, en France, avec un actionnariat majoritairement français. Outre ses activités à Nerviano, Campi Bisenzio et Pomezia, l’ancienne Finmeccanica transférerait ses participations dans Thales Alenia Space (33 %) et Telespazio (67 %). Ces deux sociétés sont déjà détenues par des investisseurs français, avec respectivement 67 % et 33 %. En 2007, l’alliance italo-française au sein des deux sociétés a donné naissance à la Space Alliance, une coentreprise qui n’a toutefois jamais répondu aux attentes des opérateurs italiens, qui cherchent depuis des années à faire évoluer la situation, notamment en termes d’équilibre actionnarial. Si le protocole d’accord signé vendredi dernier devait aboutir à un accord définitif, les entreprises italiennes seraient intégrées dans un conglomérat dans lequel la participation de Leonardo serait limitée à 32,5 pour cent, comme celle de Thales, tandis qu’Airbus, société détenue à 10,9 pour cent par l’Etat français, en détiendrait 35 pour cent.

Airbus doit en outre prévoir environ 900 millions d’euros et, selon ce qui a été découvert par « Nova », Le géant européen de l’aérospatiale devrait céder ses activités spatiales à Thales, qui détiendrait alors 67,5 % du nouveau groupe, soit plus du double de la participation de Leonardo. De plus, les valorisations des actifs industriels apportés par les trois entreprises ne coïncidant pas, il est probable que la compensation devra finalement être versée en numéraire, et non en faveur du partenaire italien. Il est clair que le contexte géopolitique actuel nécessite une consolidation de l’industrie aérospatiale et de défense européenne, mais jusqu’à présent, Leonardo a mené avec succès des collaborations portant sur des produits individuels : dans le domaine des drones avec le turc Baykar, dans celui des chars lourds avec l’allemand Rheinmetall, et dans celui du chasseur-bombardier de dernière génération GCAP avec le britannique BAE Systems et le japonais Mitsubishi.

Dans le secteur spatial, les Britanniques bénéficient d’une expertise significative, Leonardo disposant de huit sites industriels au Royaume-Uni et collaborant étroitement avec BAE Systems. L’allemand Ohb possède également une expertise significative dans le secteur spatial et renforcera certainement ses capacités grâce au plan d’investissement colossal approuvé par le gouvernement allemand (500 milliards d’euros pour les infrastructures et la défense), qui devrait porter le budget de la défense à 162 milliards d’euros par an d’ici 2029. Par ailleurs, Leonardo est le principal actionnaire privé de l’allemand Hensoldt, une entreprise spécialisée dans l’électronique de défense, dont l’État allemand détient 25,1 % du capital.

D’un point de vue technologique, le choix le plus logique aurait peut-être été un accord avec des opérateurs américains, certes bien plus importants que les entreprises européennes, notamment les sociétés spatiales dans lesquelles Leonardo détient une participation. L’ex-Finmeccanica possède cependant onze sites de production aux États-Unis, en plus d’une participation majoritaire dans Leonardo DRS, une entreprise spécialisée dans les systèmes de communication et l’électronique de défense.

La presse française a accueilli avec enthousiasme le protocole d’accord signé vendredi 24 octobre, soulignant notamment les compétences de la nouvelle entité industrielle dans le secteur des satellites. Thales Alenia a en effet inauguré sa nouvelle Space Smart Factory à Rome il y a tout juste trois semaines, ce qui devrait permettre une production de satellites supérieure à cent unités par an. À titre de comparaison, rappelons que Space X, l’entreprise d’Elon Musk, est capable de produire entre mille et mille cinq cents satellites par an et d’en lancer une centaine en orbite de manière autonome avec ses propres fusées, contre une dizaine pour le lanceur français Ariane. De plus, les satellites de la constellation Space X – une dizaine de milliers à ce jour – sont légers et en orbite basse, ce qui leur permet d’assurer des connexions numériques rapides et sécurisées. Les satellites produits par Thales Alenia Space et Airbus, en revanche, sont beaucoup plus grands, plus lourds et en orbite géostationnaire, ce qui entraîne une latence importante du signal. En Italie, Argotec, une entreprise turinoise, produit des microsatellites pesant jusqu’à 200 kilogrammes. Elle est capable de produire 50 satellites par an, destinés à des missions d’observation de la Terre, de recherche scientifique et de télécommunications. Elle contribue au programme IRIDE, promu par le gouvernement italien et financé par le NRRP, coordonné par l’Agence spatiale européenne et soutenu par l’Agence spatiale italienne. Ce programme comprend une soixantaine de satellites en orbite basse, dont le lancement est prévu d’ici la fin de l’année prochaine.

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